W est un collectif de recherche sur l’action en représentation. Qu’est-ce qu’agir sous le regard d’autrui ? Qu’est-ce qui caractérise cette relation qu’on appelle théâtre ?

Pour répondre à ces questions, W développe simultanément trois approches complémentaires : une pratique qui construit des outils et des techniques pour l’acteur ; une critique qui propose des protocoles de réception pour le spectateur ; et une théorie qui travaille à définir des notions utiles aux deux premières..

W produit notamment des jeux, un logiciel d’écriture de partitions, un précis de notions opératoires, des stages et sessions pratiques, des séminaires critiques, ainsi que divers articles et conférences.

Les jeux W sont des dispositifs qui formalisent certains aspects de l’activité du performeur, du dramaturge ou du spectateur. Ils se présentent comme des performances à jouer.

Les jeux W se donnent parfois lors de représentations publiques. Si certains nécessitent un entraînement spécifique, la plupart sont ouverts à la participation de chacun : il suffit de connaître les règles.

W présente ici quatre jeux : le Bloc, le jeu du Tombeau, Générique, le jeu de la Règle.

En complément des règles du jeu, on pourra lire les articles suivants : Tactiques de bloc, Une partie de Tombeau, 4 spectacles génériques et Une partie du jeu de la Règle.

Vous pouvez aussi télécharger ici un PDF de présentation de tous les jeux W.

RÈGLES DU JEU

  1. Le jeu du Tombeau prend la forme d’une conversation informelle autour d’une table. Le nombre de joueurs est de 2 à 8.

  2. Au début de la partie, chaque joueur est doté de 7 jetons blancs et de 3 jetons noirs. Une partie comporte plusieurs manches. La partie se termine quand un joueur s’est débarrassé de tous ses jetons.

  3. Un croupier en bout de table organise le jeu, répartit les jetons et vérifie la comptabilité. Au début de chaque partie, il a aussi la tâche de choisir un mot (dit “le goupillon”) et de le communiquer aux joueurs : “Mesdames et messieurs, le goupillon pour cette partie sera le mot X”.

  4. Une manche commence quand le croupier annonce “veuillez lâcher le goupillon”. Une conversation ordinaire s’amorce alors entre les joueurs, qui prennent la parole tour à tour, sans ordre déterminé mais en parlant distinctement l’un après l’autre. Cette phase d’introduction doit comporter au moins 2 répliques.

  5. À partir du moment où le goupillon est prononcé (“lâché”) par l’un des joueurs au détour de la conversation, chaque nouvelle réplique s’efforce de n’avoir aucun rapport avec toutes celles qui l’ont précédée depuis le début de la manche.

  6. À partir de ce moment également, et en commençant par la réplique contenant le goupillon, chaque joueur dépose au centre de la table (“le pot”) un jeton blanc quand il prononce une réplique.

  7. Si un joueur A est en mesure d’établir un rapport entre la réplique qui vient d’être prononcée par un joueur B et l’une des répliques précédentes de la manche, il dépose un jeton noir sur la table et s’écrie “Tombeau !”

  8. Si le rapport est évident, le joueur B ramasse aussitôt le pot. Si ce n’est pas le cas, le croupier peut demander à A d’“ouvrir le tombeau”, c'est-à-dire d’expliciter le rapport perçu entre les deux répliques. Le croupier évalue cette explicitation. S’il la juge valide, le joueur B ramasse le pot ; dans le cas contraire, c’est-à-dire si le croupier estime que le rapport n’est pas assez clair ou direct, c’est A qui ramasse le pot. Dans les deux cas, la manche est conclue (retour à la règle 4).

  9. Les décisions du croupier sont souveraines et ne peuvent pas être contestées.

  10. S’expose à un tombeau toute réplique pouvant être entendue comme une réponse possible ou normale à celle qui lui précède. A fortiori, une réplique sèche et générique de type “oui”, “d’accord”, “moi aussi”, “tout à fait”, etc., s’expose à un tombeau.

  11. En revanche, si un joueur n’a pas entendu la réplique qui vient d’être prononcée, il peut demander “pardon ?” pour qu’on la lui répète, sans risquer le tombeau.

  12. La forme générale de la conversation doit être préservée en dépit de son non-sens. Cela autorise d’une part toutes les articulations en usage dans le discours oral ; cela demande d’autre part une attention particulière à la circulation de la parole à l’intérieur du groupe, au mouvement des adresses, aux marques d’accord ou de désaccord, de question et de réponse, etc.

  13. En particulier, si dans la conversation un joueur attaque, c’est-à-dire adresse une réplique à un autre joueur, ce dernier (à moins qu’il ne soit sauvé par l’intervention d’un autre joueur) est tenu de défendre, c’est-à-dire de répondre ou de répliquer dans le rythme de la conversation. Si le joueur manque de répartie et reste trop longtemps interdit, le croupier déclare “le muet prend le pot”. La manche est alors conclue.

  14. À l’inverse, si un joueur place impertinemment une réplique sans tenir compte du mouvement de la conversation, par exemple en coupant la parole ou en répondant à la place d’un autre joueur, le croupier peut prononcer une pénalité. Il déclare alors “le sourd prend n jetons”, ce nombre ayant été évalué à la hauteur de l’impertinence commise. La manche reprend alors où elle avait été interrompue.

  15. Un joueur qui n’a plus de jetons noirs ne peut s’écrier “Tombeau !”

  16. Un joueur qui n’a plus de jetons blancs est dit “fou” : il peut alors parler normalement et intervenir à n’importe quel escient. Les répliques d’un fou sont “hors-jeu”, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent jamais faire l’objet d’un tombeau. Elles servent essentiellement à perturber et à piéger les autres joueurs. En effet, si un joueur inconsidérément s’écrie “Tombeau !” suite à la la réplique d’un fou, le croupier déclare “Le fou a parlé”, le joueur imprudent ramasse le pot, et la manche est conclue.

  17. Quand un joueur s’est défait de son dernier jeton, le croupier s’écrie “Flambeau !” et le déclare vainqueur de la partie.

Lire aussi l'article Une partie de Tombeau